Lu en septembre 2020
L’Art de la joie est un roman de Goliarda Sapienza écrit entre 1967 et 1976 en Sicile. L’autrice, née en 1924 à Catane est décédée en 1996 et son œuvre ne sera publiée, que timidement, à titre posthume en 1998. En effet, les éditeurs italiens de l’époque ont largement refusé la publication de ce roman. Et avec une notion d’histoire, on peut comprendre pourquoi.
"Voilà, c'était ça le bon chemin : il fallait, comme on étudie la grammaire, la musique, étudier les émotions que les autres provoquent en nous."
L’histoire raconte la vie de Modesta, née le 1er janvier en 1900 en Sicile. On rencontre au début une gamine très pauvre, âgée de peut-être 8 ou 9 ans, qui grandit au fil des chapitres jusqu’à devenir cette femme, une Princesse, libre, indépendante, ni soumise ni dominante, cultivée et passionnante. Sa vie, ses pensées intimes, ses vices, ses passions, ses enfants, ses amant(e)s, ses opinions politiques, sociales, religieuses… Modesta se livre toute entière à nous, et nous, on en redemande !
Dès les premières pages on se prend un coup de massue sur la tête. L’entrée m’a rappelée L’Étranger de Camus. Oui, on arrive dans la tête d’une personne pas comme les autres. Du moment où on a compris ça, on ne lâche plus Modesta. L’Art de la joie est défini dans la catégorie des livres d’apprentissage parce qu’au travers de la narratrice, on apprend à penser, à se positionner, à vivre. Plus que d’apprentissage, c’est un roman d’émancipation. La pauvreté, la guerre, la sexualité féminine, la vie, l’amour, l’intelligence, la liberté, la politique, le temps qui passe, l’émancipation féminine et la mort sont les thèmes abordés avec énergie et sans faux-semblants. Modesta est intelligente, d’une force et d’une sagesse incroyable, sagesse qu’elle acquiert au fil de sa vie et de ses rencontres.

En lisant l’Art de la joie, j’ai rencontré une femme, une amie, une amante, une mère, une sœur. J’ai ri, j’ai tremblé, j’ai acquiescé avec vigueur ou en silence, j’ai ouvert grands les yeux, j’ai été fière. Cette œuvre est un chef-d’œuvre comme il en existe si peu. Si vous aimez la vie, les femmes et la philosophie, vous aimerez forcément l’Art de la Joie.
Ce que j'ai aimé dans ce livre :
L'immersion complète dans les pensées de la narratrice
Le contexte historique et politique de l'œuvre
La rencontre avec un personnage féminin fort et intelligent
Les réflexions philosophiques, politiques et sociales auxquelles l'autrice nous confronte
L'évolution du protagoniste sur toute une vie
La particularité du style de l'autrice
Ce que j'ai moins aimé dans ce livre :
La longueur du livre qui peut faire peur : 700 pages !
Le style hybride de l'œuvre avec des passages du "je" au "elle" inexpliqués et des morceaux de pièces de théâtre qui apparaissent par moment.